Le secteur vise à créer des produits durables et circulaires pour générer du bien-être et de la prospérité dans les limites planétaires.
Dans l’industrie chimique et pharmaceutique, tout gravite autour des molécules. Les produits fabriqués par le secteur occupent une place centrale dans tous les aspects de notre vie quotidienne : de la peinture murale aux analgésiques dans l’armoire à pharmacie, du casque cycliste aux panneaux solaires sur le toit,… Les consommateurs n’ont généralement pas conscience du rôle crucial que joue la chimie dans la conception des objets du quotidien.
Le secteur chimique fournit, directement ou indirectement, la quasi-totalité des matériaux nécessaires à la société : pour l’alimentation, le transport, la santé ou encore la sécurité des personnes. C’est ce qui ressort d’une étude de la Commission européenne, selon laquelle 95 % des produits et biens en Europe dépendent de produits ou de procédés chimiques.
La chimie est une industrie fermement ancrée dans toutes les branches de notre société et liée à la quasi-totalité des secteurs économiques. Autrement dit, la chimie est souvent le point de départ de chaînes de valeur très complexes, qu’elles soient locales, européennes, voire internationales.
Le secteur de la chimie et des sciences de la vie est donc un levier essentiel du succès de la transition vers une économie circulaire. C’est une belle opportunité, mais aussi une grande responsabilité, de poser les jalons de l’économie circulaire de demain.
L’économie linéaire, qui repose sur l’élimination des produits et matériaux en fin de vie, a fait son temps. En effet, les déchets, recyclés dans le meilleur des cas, finissent encore trop souvent en incinérateur ou en décharge, entraînant une perte importante de substances et de matériaux précieux.L’économie circulaire est organisée différemment. Les déchets sont revalorisés et redeviennent des matières premières. Les matériaux peuvent ainsi circuler dans un modèle en circuit fermé où ils sont réutilisés le plus longtemps possible et où leur valeur sociale et économique est maximisée. Grâce à cette circularité, le recours aux matières premières vierges est réduit, ce qui est favorable pour l’environnement.
Par exemple, les déchets de production provenant de l’agriculture ou du secteur agroalimentaire peuvent servir de matières premières biobasées dans le secteur chimique, tandis que les nouvelles technologies permettent de récupérer des produits chimiques de meilleure qualité et en plus grande quantité dans les flux de déchets d’autres secteurs. Dans une économie circulaire, les entreprises des différents secteurs industriels sont encore plus interdépendantes que par le passé, car le produit final ou résiduel de l’une est la matière première de l’autre.
Cette forme de symbiose industrielle est depuis longtemps monnaie courante dans l’industrie de la chimie et des sciences de la vie ; les entreprises s’échangent des sous-produits, de l’énergie et des flux connexes. Le réseau de canalisations dense et étendu qui relie le cluster chimique d’Anvers au reste de la Belgique et de l’Europe en est un bel exemple.
Dès le XIXe siècle, la boucle des matériaux et de l’énergie figurait déjà dans le plan des usines chimiques. Depuis les chocs pétroliers des années 70 et 80 du siècle dernier, l’utilisation de la chaleur résiduelle et des résidus de fabrication est devenue un réflexe industriel, au sein d’une même entreprise chimique, mais aussi entre différentes sociétés voisines.
L’économie circulaire va encore plus loin. Là où une symbiose industrielle a lieu entre des entreprises situées dans des zones industrielles souvent clairement délimitées, l’économie circulaire vise à englober l’ensemble de l’économie et donc les nombreux produits que nous utilisons tous au quotidien. Cette circularité a un impact majeur sur les procédures d’achat, les processus logistiques, les modèles de financement et les méthodes de recyclage, entre autres.L’entreprise circulaire naît d’une réflexion circulaire. Au cours de la phase de conception d’un produit ou d’un procédé, il convient de déjà réfléchir à la revalorisation du produit à la fin de son cycle de vie ou à la façon d’optimiser le procédé. C’est là que réside la force de la chimie, car elle connaît mieux que quiconque les molécules et les matériaux, les procédés chimiques et biotechnologiques de création et de transformation.
Ces connaissances sont continuellement approfondies par des investissements croissants dans la recherche et le développement. Grâce aux innovations d’aujourd’hui, la chimie forge l’économie circulaire de demain. Par exemple, nous investissons massivement dans la recherche de matières premières neutres pour le climat, comme la biomasse, les plastiques recyclés ou encore le CO2.
Pour ce qui est des matériaux et des molécules biodégradables, le secteur s’appuie sur leurs propriétés de dégradabilité naturelle, par exemple lorsque des produits chimiques se destinent à entrer en contact avec l’environnement au cours de leur utilisation. Citons l’huile lubrifiante des tronçonneuses forestières, les produits cosmétiques à rincer ou les points de suture après une opération.
Lors de l’invention de nouvelles molécules, les substances les plus sûres pour les travailleurs, les consommateurs, la faune et la flore sont systématiquement recherchées. La sécurité est ancrée dans l’ADN de la chimie et des sciences de la vie et constitue un point d’attention permanent dans chaque processus d’innovation.Cependant, les avantages sociétaux d’une substance potentiellement dangereuse sont parfois si importants – comme dans le cas de certains catalyseurs qui génèrent d’énormes gains d’efficacité dans des processus de production spécifiques, ou qui sont nécessaires pour produire de l’hydrogène ou encore développer de nouveaux médicaments – qu’il est utile de poursuivre la recherche, même si la substance a des propriétés intrinsèquement dangereuses.
L’industrie chimique et pharmaceutique travaille souvent avec des substances toxiques ou corrosives potentiellement très dangereuses. Mais le danger ne présente un risque pour l’individu qu’en fonction de son exposition à ce danger. Prenons l’exemple du cobra. Si ce serpent dangereux car venimeux et mortel se retrouve dans votre salon, le risque de vous faire mordre est grand. Si, par contre, l’animal se trouve dans une cage sécurisée au zoo, le risque est presque nul. Il en va de même pour la chimie et les sciences de la vie. Les produits chimiques dangereux peuvent être utilisés en toute sécurité tant que les risques sont maîtrisés.
La législation européenne REACH (Registration, Evaluation, Authorisation and Restriction of Chemicals) protège l’homme et l’environnement de manière optimale contre les risques que peuvent poser les produits chimiques. Cela s’applique non seulement aux produits chimiques utilisés dans les procédés de production industrielle, mais aussi aux substances que nous utilisons au quotidien.
Ce règlement européen contraint les entreprises à tester minutieusement les risques potentiels pour la santé et la sécurité de certains produits chimiques avant que leur utilisation dans des produits et procédés ne soit autorisée. Tous ces résultats de recherche, qui portent aujourd’hui sur plus de 22.000 substances, sont accessibles au public sur le site Web de l’Agence européenne des produits chimiques (ECHA). Avec près de 4.000 substances enregistrées, la Belgique est l’un des leaders en Europe.
Avec REACH, l’Europe donne le ton dans le domaine de la sécurité et de la circularité des substances chimiques. Cependant, le système ne fonctionne pas encore de manière optimale. Des désaccords se produisent encore trop souvent à la limite entre les connaissances scientifiques, l’innovation industrielle et la prise de décision politique. Cela peut parfois conduire à une remise en question ouverte des décisions prises par des agences européennes pourtant indépendantes et agréées, après quoi les États membres prennent leur propre chemin et des règles différentes s’appliquent à travers l’Europe.
Ces désaccords mettent à mal un système qu’on envie à notre région prospère. Il convient donc d’œuvrer en permanence pour un cadre juridique stable, qui identifie les risques et les gère de manière appropriée. De cette façon uniquement, le secteur chimique contribuera activement, à travers ses molécules et ses matériaux, à la conception de produits durables dans une économie circulaire ; des produits qui pourront être réutilisés après leur première phase d’utilisation, dans la même application ou pour un usage différent.
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Les enjeux de l’économie circulaire sont vastes, diversifiés et urgents. L’innovation est essentielle à la mise en œuvre de nouvelles formes de recyclage, mais aussi pour l’écodesign intelligent et même la location de produits chimiques. Cela requiert la mise au point de nouvelles substances, techniques et de nouveaux procédés : chimiques, techniques ou biotechnologiques.
L’évaluation de la sécurité et de la durabilité de ces innovations est un vrai challenge. La science et la technologie évoluent sans cesse, les produits changent et de nouveaux produits sont développés. C’est pourquoi une évaluation continue des effets des produits et de leur utilisation est nécessaire. Des procédures transparentes et des décisions claires sont indispensables, de même que l’adhésion de la société à un niveau de risque acceptable.
Il est essentiel de pouvoir faire les bons choix, scientifiquement fondés. Cette évaluation complexe s’étend à divers domaines politiques. Elle nécessite des analyses fiables et comparables du cycle de vie des produits, une collaboration multidisciplinaire et même le recours à la numérisation et à l’intelligence artificielle en vue d’accélérer les analyses et les rendre plus précises.
De plus, une économie circulaire ne sera une réussite que si elle est compétitive et rentable. Elle doit donc être soutenue par les autorités publiques et les investisseurs afin de réunir des fonds et de faciliter l’autorisation des projets circulaires. L’État doit également veiller à une stricte application de la législation pour assurer que les marchandises importées respectent les exigences européennes élevées en matière de sécurité et de qualité. Cela permettra d’éviter que l’économie circulaire en Europe ne soit perturbée par des flux de matériaux de qualité inférieure non réutilisables.
La clé du succès de la chimie et des sciences de la vie réside dans le vaste éventail de produits qui garantissent bien-être et qualité de vie. L’intégration de cette valeur ajoutée sociale dans un modèle circulaire devrait être la principale motivation de toute forme d’entrepreneuriat. Une industrie chimique durable est une industrie chimique qui s’inscrit dans les limites de la planète et qui peut ainsi assurer une prospérité pérenne.